Le requiem des amants
La nuit était glacée et la mer déchaînée, Lialine épouvantée fuyait le courroux du ciel qui semblait s’abattre sur elle. Depuis la mort de Kaël, seule la mer arrivait encore à conjurer le mauvais sort ; elle se souvenait parfois de l’endroit où son père avait retrouvé ce petit corps inanimé que tout le monde croyait éteint. Chacun pensait qu’elle ne survivrait jamais au triste destin de celui qu’elle aimait, mais le temps fit qu’elle revint lentement à la vie.
A qui devait-elle la fin de Kaël ? Sa douleur serait elle éternelle ? A présent le temps n’était plus aux questions, elle naviguait entre les mers sur le radeau de son père tout en espérant que les étoiles de l’océan seraient pour elle une réponse a toutes les questions, qui depuis tant de temps enflammaient ses passions.
Les vagues par dizaines recouvraient le bateau et la peur surgit sur elle comme le vent sur les flots. Elle se retourna mais le rivage n’était plus à portée de vue, elle comprit alors qu’elle devait faire face à son destin que le temps était venue pour elle d’affronter l’inconnu. Elle regarda devant elle et cria aux cieux qu’elle rejoindrait Kaël dans son rêve merveilleux. Ses habits étaient trempés, son corps était gelé. Alors elle décida d’ôter ses vêtements et les offrit à la mer, comme le premier symbole de son départ de la terre : pureté du combat face aux éléments et premiers pas vers la fin du tourment. Elle était nue sur le radeau, le sang glacé par le vent qui courait sur sa peau. Elle oublia un instant ses peurs, forte du souvenir de Kaël dans son cœur, se redressa vers le néant scrutant l’horizon menaçant. Elle tendit ses mains vers le ciel implorant la lune de la conduire près de Kaël, elle offrait à la mer, son corps et son âme tout entière. Elle n’avait plus de regret, plus de souvenirs, plus d’intérêt, seul l’amour de son père l’empêchait encore, de plonger pour quitter son corps.
Pourquoi faut il choisir entre vivre et puis mourir, peut on vraiment détruire tout espoir de sourire ? Parfois la vie se dérobe sous nos pas, parfois la solution est cachée, et quand on ne pense plus avoir de choix, c’est que le rêve est brisé.
Lialine avait de peu échappé au drame de sa destinée, quand elle avait arrêté son cœur au visage de la terreur. La perte de Kaël l’avait bouleversée, pour elle toute voie était condamnée. Elle ne s’imaginait pas vivre sans lui, pour elle à jamais son cœur était détruit. Elle avait pris sa décision, n’écoutant que ses passions, elle allait rejoindre Kaël par la mer et pour le ciel. Alors son cœur à nouveau serein, le courroux des flots semblait éteint : la lune se reflétait sur l’immensité de l’océan, prêt à accueillir le corps de cette enfant. Lialine se releva doucement, prête à s’offrir aux éléments, puis se mit à chanter, laissant ses larmes couler. Elle chantait sa destinée, la voix douce d’une âme damnée, elle chantait pour son père, pour Kaël et pour la mer, le dernier chant d’une jeune âme, pleurant sur sa vie comme sur un drame. Mais à nouveau elle était sereine car bientôt s’effaceraient ses peines.
Puis vint la fin de son requiem, le début de la bohème. Elle se sentait partir, malgré tout elle souriait : dans les flots elle allait périr, retrouver l’homme qu’elle aimait.
L’histoire ne nous dit pas si les âmes se sont retrouvées, malgré tout le trépas un cœur de plus a absorbé, la légende raconte pourtant qu’après la colère des éléments, le cœur des marins est troublé par un chant triste et émouvant que l’on a depuis nommé « Le Requiem des amants ».
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